Jean était assis sur un banc. Il regardait les gens et les écureils du parc passés devant lui. Il entendait le bruit des chevaux de la garde montée et d'une calèche juste derrière son dos, au-delà des limites du parc. tout avait l'air si différent de l'autre côté de l'océan. Joli lieu commun, et pourtant, c'était vrai. Sa douleur ne l'avait pas quitté mais personne ne pouvait savoir ce qui lui était arrivé ici. Il pouvait sourir de temps en temps s'il en avait envie et il avait même le droit de ne pas y penser durant tout une minute.
Tout avait été si simple. Il était simplement sorti de sa fac et c'était directement rendu à l'aéroport pour prendre le premier vol pour Québec. Il se chargerait des formalités administratives par courrier. Quelques minutes après le décollage, il regarda par le hublot, observa la mer et se sentir libéré. Il allait là où personne ne le connaissait, là où il pouvait recommencer et repartir à zéro. Commencer une nouvelle vie.
Sa nouvelle vie avait plutôt bien commenc. Arrivé à Québec, il avait immédiatement contacté sa fac pour les échanges. Il était ensuite allé dans une association d'aide aux étudiants étrangers pour trouver un logement, après deux nuits à l'hôtel, il avait trouvé une chambre. À présent tout était réglé comme du papier à musique. Il se levait assez tôt, allait courir dans le parc, rentrait prendre son petit-déjeuner et prendre une douche. Avant le repas, il allait faire une partie d'échec dans le parc avec des inconnus auxquels il commençait à s'habituer. Il mangeait à l'extérieur, en se promenant dans la ville, en essayant de trouver de nouveaux lieux, de nouveaux magasins. Au bout d'un temps qui pouvait varier de deux à trois heures, il trouvait un endroit agréable et s'installait pour lire jusqu'à ce que la lumière du jour diminue. Là , il rentrait chez lui, se préparait à dîner et ressortait se promener dans la nuit naissante, juste avant que le soleil et ce coin de ciel bleu au loin, déjà bien rouge, n'abandonne la bataille. C'était le moment de la journée qu'il préférait et il était persuadé que cette couleur là possédait des vertues thérapeutiques. Il lui suffisait de sentir cet air particulier, ce petit vent tendre, et de voir cette couleur dans le ciel pour que toutes les tensions qui l'habitaient s'évacuent d'elle-même.
Et le lendemain tout recommençait de la même façon. Il avait toujours détesté la monotonie mais là , il avait besoin d'une stabilité qu'il n'avait plus depuis bien longtemps, oui qu'il n'avait peut-être jamais eu.