Dimanche 13 avril 2008 Ã 19:26
Le mois de mars s'annonçait plutôt bien. Après trois mois à essayer de survivre dans l'ombre du tunnel, Jean se sentait enfin tout simplement heureux que ce soit le printemps. Il reprenait goût aux choses simples. Il suffisait parfois de rien pour se sentir mieux, comme de pouvoir aller en cours dans la lumière du soleil et non pas en pleine nuit. Carole était restée un mois et demi avec ce traitre de Manu. Sale période pour Jean. Il n'était guère aller mieux le mois et demi suivant. Il ne l'avait toujours pas oublié mais il se sentait à présent assez fort pour pouvoir lui reparler. Trois mois c'était long. La vieille amitié qui les unissait tous était à présent totalement démantelée.
Nathan et Rébecca s'étaient installés ensemble et l'invitaient régulièrement à dîner mais il ne s'amusait plus avec Nathan comme avant, ils avaient perdu leurs rires et leur innocence d'enfant. L'amitié persistait et c'était sûrement l'essentiel mais ... Jean n'était pas prêt à totalement grandir encore, ce qu'avait fait Nathan en entrant entièrement dans le monde des adultes et de l'engagement sur papier. Il fondait sa famille. Il n'avait plus adresser la parole à Manu et à Carole depuis le mariage de Jean. Magali et lui était devenu plus proche qu'avant. Jean la soupçonnait de le soutenir parce que, secrètement, elle ressentait la même chose que lui. Elle avait essayé de cacher ses larmes ce soir là en voyant Manu avec Carole. La déduction était aisée même s'ils avaient silencieusement décidé de ne jamais en parler entre eux.
C'était le premier matin où sa première pensée ne fût pas pour Carole mais pour le soleil qui passait à traves les volets et chauffait sa couette. Il s'en réjouit; la guérison était puet-être possible. Il voulait déjà commencer par prendre un petit peu plus soin de lui ; manger par exemple, arrêter de fumer et de boire n'importe quoi, arrêter de finir ses nuits dans les bras de n'importe qui, arrêter de ne pas aller en cours, arrêter de passer des journées entières dans le noir sans même ouvrir ses volets, sans quitter son lit, arrêter de ressembler à un zombie, commencer à rejoindre le monde des vivants, des sourires, des rayons de soleil qui réchauffent les yeux tristes.
"Aujourd'hui je recommence. Je recommence à vivre. Le moment est venu, c'est certain." Dans un jeu enfantin, Jean replie ses jambes vers son corps, et dans une détente rapide, rejette sa couette le plus haut et le plus loin possible. Jean sourit. Il enfile rapidement quelques vêtements et file faire des courses, tout était vide, il ne mangeait plus vraiment depuis un moment mais les choses allaient changer.
De retour, il fouille partout dans sa chambre à la recherche d'une feuille et d'un stylo. Ces précieux trésors en main il note : " 'J'appris ainsi par ma propre expérience que la source du vrai bonheur réside en nous et qu'il ne dépend pas des hommes de rendre vraiment misérable celui qui sait vouloir être heureux'. Jean-Jaques Rousseau, 2ème promenade des Rêveries du promeneur solitaire" . Une bonne chose ne pas oublier. Terminé de se laisser couler. S'il veut être heureux, il sera heureux. Il l'a déjà été, il peut encore l'être. Cette magie humaine, cette capacité à ressentir espoir et bonheur n'est qu'en lui et il ne la trouvera pas ailleurs. Alors il va s'en sortir, se battre et vivre sa vie en dehors de pauvres petites histoires sentimentales d'adolescents. Même si son amour en a pris un coup, dans le fond, il sent bien que ce n'est que ça, "une petite histoire sentimentale" qui n'en est même pas une.
crapulerie publiée par Céline